Il était peintre à ses heures et visiteur
de prison aussi, deux activités qui se voulaient complémentaires;
Il avait pris pour habitude , lors de ses visites aux détenus d'emporter avec lui un carnet de croquis et
lors de ses entretiens avec les prisonniers il croquait leurs visages en quelques traits surs .
Il cherchait depuis toujours à cerner derrière l'apparence les traits de l'âme qui les avaient amenés un
jour à basculer dans l'horreur et à devenir des criminels.
Il se servait ensuite des croquis pour en faire des portraits s'inspirant de leurs entretiens pour essayer de faire ressortir
dans ses toiles le moi profond de ses modèles.
Il s'était fait une belle réputation avec ces portraits qui étaient plébiscités non seulement par des
amateurs d'art , mais aussi par les psychologues du milieu carcéral qui y trouvaient matière à réflexion sur les réactions de l'homme.
Il demandait toujours aux détenus l'autorisation de les reproduire en peinture et parfois leur reversait une partie du
produit de la vente de ses toiles , ce qu'il appelait en riant la part de l'ombre.
Un jour il fut amené à visiter un homme dont les crimes particulièrement horribles avaient défrayés la
chronique de nombreux mois.
Le visage de Georges c'est ainsi que nous l'appellerons ne laissait rien paraître de ses sentiments ni des actes qu'il
avait perpétué, il était lisse , de ces personnalités sans grand relief que l'on oublie aussitôt vues .
Notre peintre ne lui avait pas demandé de suite l'autorisation de faire son portrait attendant de cerner sa
personnalité.
Ils parlaient de choses et d'autres , lors de ses entretiens , il lui portant des livres sur l'art, sans jamais aborder les raisons
qui l'avaient envoyé en prison pour une période incompressible de trente ans.
Georges qui ne s'était jamais distingué avant les faits , avait étranglé ses parents un matin puis les avaient dépecés
et donnés aux cochons qu'ils élevaient dans leur ferme de Correze
Il était parti ensuite travailler à la poste du village où il exerçait le métier de facteur , c'est au cours de sa tournée que les
gendarmes étaient venus l'arrêter.
Il s'était enfin résolu de lui demander l'autorisation de le peindre le jour ou amenant la conversation sur le crime
commis il avait vu en un instant le regard de Georges s'éclairer d'un éclat diabolique alors qu'aucun trait de son visage ne bougeait .
Georges le regard longuement avant de lui répondre fermement par la négative sans donner de raisons.
Déçu il renonça à son projet jusqu'au jour ou pris d'une impatience subite il se mis à crayonner
sa page blanche , recherchant désespérément à retranscrire l'expression qu'il avait vu dans le regard de Georges un instant fugace.
De ce jour il n'eut de cesse de faire le tableau malgré le refus de son modèle, en se disant qu'il ne le sortirait pas
de son atelier.
Vint le jour ou la toile fut presque achevée , le visage de Georges crevait la toile , il allait mettre une dernière
touche à l'inquiétant regard quant il sentit un poigne forte le prendre à la gorge.
Il tenta de se dégager mais la main le serrait de plus en plus fort , il vit avec horreur que c'était celle de
Georges qui sortait du tableau, son regard animé d'un éclat diabolique.
Il eu un instant le réflexe de survie de prendre d'une main tâtonnante un petit chalumeau dont il s'était
servi pour décaper la peinture d'une vielle porte qui était resté allumé en veille à coté de lui, il projeta la flamme sur la toile menaçante qui pris feu en un
instant.
La main de Georges desserra son étreinte, tandis que la toile se tordait sous l'effet de la chaleur dans un
sifflement qui ressemblait à un cri.
Il s'évanouit quelques instants , quand il retrouva ses esprits , la toile était entièrement détruite.
il cru à un cauchemar , mais se regardant dans un miroir il vit autour de son cou les traces rouges de
strangulation.
De ce jour il abandonna la peinture et se mis à la sculpture, certains dirent qu'on l'avait trouvé quelques
années plus tard la tête fracassée devant un buste de marbre dont le visage rappelait curieusement celui d'un assassin qui avait en son temps défrayé la
chronique.
Quand à Georges il bénéficia d'une remise de peine pour bonne conduite et élève des porcs en Correze. (note de l'auteur - le buste emprunté n'a bien sur acun rapport avec georges sinon pour les besoins de l'illustration)